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                   • Manuel Réaliste-Convenable du Comm-Anar

                   • Œuvres de Freddy Malot par ordre chronologique

 

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Civilisation Spiritualiste

Dieu, Architecte de la Création

La Tentation d’Adam et Ève

Civilisés Pré-Modernes

Christianisme Impérial

Église Souffrante

Isaïe 53 (1-12)

Les Messies Zélotes

Sabéens

Jean Baptiste

Le Testament Chrétien

Symbole d’Hippolyte

Hippolyte de Rome : exposé de la doctrine orthodoxe

Mentalités en Arabie (600 P.C.)

L’Islam Classique

Mahomet – Le Koran

Jean 14 : 16

Manî

Mazdak (470-524)

Muezzin

Les Statuts Gouvernementaux

De la Capitation des “Protégés” sous les Califes et Sultans

La République Moderne

Anciens – Modernes

Antisémites !

Ouriel Da Costa

Joseph David Sintzheim

Napoléon et le Grand Sanhédrin

Octobre 1917 : Lénine arrive !

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Dieu, Architecte de la Création

Dieu, Architecte de la Création

Extrait du manuscrit de la Bible d’Holkham
(Angleterre, 14ème siècle)

La Tentation d’Adam et Ève

La Tentation d’Adam et Ève

Gravure sur bois
 (France, vers 1500)

Civilisés Pré-Modernes

(2100 ans)

Civilisés Pré-Modernes

Christianisme Impérial

(260 ans)

Christianisme Impérial

Église Souffrante

Église Souffrante

Isaïe 53 (1-12)

(Les Juifs annoncent Jésus-Christ, selon les chrétiens.)

Qui a ajouté foi à ce que nous avons entendu ? Et quant au bras de Jéhovah, à qui a-t-il été révélé ? Il s’élèvera comme une jeune pousse devant quelqu’un, comme une racine [qui sort] d’une terre aride. Il n’a ni forme imposante ni aucune splendeur ; et quand nous le verrons, il n’y aura pas l’apparence pour que nous le désirions.

Il était méprisé, il était celui que les hommes fuient — homme destiné aux douleurs et à avoir une connaissance de la maladie. Et c’était comme si la face de quelqu’un nous était cachée. Il était méprisé, et nous le comptions pour rien. Vraiment, c’est de nos maladies qu’il s’est chargé ; et quant à nos douleurs, il les a portées. Mais nous, nous l’avons considéré comme touché, frappé par Dieu et affligé. Mais il était transpercé pour notre transgression ; il était écrasé pour nos fautes. Le châtiment qui devait servir à notre paix était sur lui, et à cause de ses blessures il y a eu guérison pour nous. Nous tous, comme des brebis, nous étions errants ; nous nous tournions chacun vers sa propre voie ; et Jéhovah lui-même a fait que la faute de nous tous rencontre celui-là. Il était serré de près, et il se laissait affliger ; pourtant il n’ouvrait pas la bouche. Il était mené comme un mouton à l’abattage ; et comme une brebis qui devant ses tondeurs est devenue muette, lui non plus n’ouvrait pas la bouche.

À cause de la contrainte et du jugement, il a été enlevé ; et qui s’intéressera [aux détails de] sa génération ? Car il a été coupé du pays des vivants. À cause de la transgression de mon peuple, il a reçu le coup. Et il fera sa tombe auprès des méchants, et auprès de la classe des riches dans sa mort, bien qu’il n’ait pas commis de violence et qu’il n’y ait pas eu de tromperie dans sa bouche.

Mais Jéhovah lui-même a pris plaisir à l’écraser ; il l’a rendu malade. Si tu mets son âme comme sacrifice de culpabilité, il verra sa descendance, il prolongera [ses] jours, et en sa main réussira ce qui est le plaisir de Jéhovah. À cause du tourment de son âme, il verra, il sera rassasié. Par le moyen de sa connaissance, le juste, mon serviteur, fera que beaucoup seront tenus pour justes ; et lui-même portera leurs fautes. C’est pourquoi je lui donnerai une part parmi la multitude, et ce sera avec les puissants qu’il répartira le butin, parce qu’il a répandu son âme dans la mort, et que c’est avec les transgresseurs qu’il a été compté ; et lui-même a porté le péché de beaucoup, et il s’est mis à intervenir pour les transgresseurs.

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Les Messies Zélotes

Zélotes = Sicaires. La “quatrième philosophie” des Juifs (Pharisiens, Sadducéens, Esséniens, Zélotes).

Les Messies Zélotes

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Sabéens

Encyclopédie Diderot – 1772

SABAISME, ou SABIISME, s. m. (Théol.) comme le nomme M. Fourmont l’aîné. C’est le nom de la première sorte d’idolâtrie qui soit entrée dans le monde. Voyez IDOLATRIE.

Le Sabaïsme consistait à adorer les étoiles, ou, comme le porte le texte de l’Écriture, tuba schamaïm, ou seba schamaïm, omnes militias coeli ; et l’on sait que par ces termes, les Hébreux entendaient les astres et les étoiles : d’où les modernes ont formé le mot Sabaïsme, pour exprimer l’idolâtrie, qui consiste à adorer les corps célestes, et celui de Sabéens pour signifier ceux qui les adorent. Mais comme le mot hébreu d’où celui-ci est formé, est écrit avec un tzade, que les langues modernes rendent par une S ou par un Z, d’autres par TS ou par TZ : de-là vient qu’on trouve ce mot écrit avec différentes lettres initiales.

Quelques-uns croient que le Sabaïsme était la plus ancienne religion du monde, et ils en mettent l’origine sous Seth fils d’Adam, d’autres sous Noé, d’autres sous Nachor père de Tharé et aïeul d’Abraham. Maimonide qui en parle fréquemment dans son More Nevochim, remarque qu’elle était généralement répandue au temps de Moïse, et qu’Abraham la professait avant qu’il fût sorti de la Chaldée. Il ajoute que les Sabéens enseignaient que Dieu est l’esprit de la sphère et l’âme du monde ; qu’ils n’admettaient point d’autres dieux que les étoiles, et que dans leurs livres traduits en arabe, ils assurent que les étoiles fixes sont des dieux inférieurs, mais que le Soleil et la lune sont les dieux supérieurs. Enfin, ajoutent-ils, Abraham par la suite abandonna cette religion et enseigna le premier qu’il y avait un dieu différent du Soleil. Le roi des Euthéens le fit mettre en prison ; mais ce prince voyant qu’il persistait dans son opinion, et craignant que cette innovation ne troublât son état et ne détruisit l’idée qu’on avait des divinités adorées jusqu’alors, confisqua ses biens, et le bannit à l’extrémité de l’orient. Cette relation se trouve dans le livre intitulé la religion des Nabathéens.

Maimonide dit encore que les Sabéens joignaient à l’adoration des étoiles un grand respect pour l’agriculture et pour les bêtes à cornes et les moutons, enseignant qu’il était défendu de les tuer ; qu’ils adoraient le démon sous la figure d’un bouc, et mangeaient le sang des animaux, quoiqu’ils le jugeassent impur, parce qu’ils pensaient que les démons eux-mêmes s’en nourrissaient : tout cela approche fort de l’idolâtrie.

M. Hyde, dans son histoire de la religion des Perses, s’est au contraire attaché à prouver que le Sabaïsme était fort différent du Paganisme. Il prétend que Sem et Élam sont les premiers auteurs de cette religion ; que si dans la suite elle parut être altérée de sa première pureté, Abraham la réforma et soutint sa réformation contre Nemrod qui la persécuta ; que Zoroastre vint ensuite et rétablit le culte du vrai Dieu qu’Abraham avait enseigné ; que le feu des anciens Persans était la même chose que celui que conservaient les prêtres dans le temple de Jérusalem ; et qu’enfin les premiers ne rendaient au Soleil qu’un culte subalterne et subordonné au culte du vrai Dieu.

Selon M. Prideaux, le Sabaïsme était encore moins criminel. L’unité d’un Dieu et la nécessité d’un médiateur était originairement une persuasion générale et régnante parmi tous les hommes. L’unité d’un Dieu se découvre par la lumière naturelle : le besoin que nous avons d’un médiateur pour avoir accès auprès de l’Être suprême, est une suite de cette première idée. Mais les hommes n’ayant pas eu la connaissance, ou ayant oublié ce que la révélation avait appris à Adam des qualités du médiateur, ils en choisirent eux-mêmes, et ne voyant rien de plus beau ni de plus parfait que les astres dans lesquels ils supposaient que résidaient des intelligences qui animaient et qui gouvernaient ces grands corps, ils crurent qu’il n’y en avait point de plus propre pour servir de médiateur entre Dieu et eux. Et enfin, parce que les planètes étaient de tous les corps célestes les plus proches de la terre et celles qui avaient le plus d’influence sur elle, ils lui donnèrent le premier rang parmi ces médiateurs ; et sur ce pié-là ils firent le Soleil et la Lune les premiers objets de leur culte. Voilà, selon M. Prideaux, la première origine de l’ancien Sabaïsme. hist. des Juifs. I. part. l. iij. p. 319.

Nous disons l’ancien Sabaïsme ; car il subsiste encore une religion de ce nom dans l’orient, qui paraît être un composé du Judaïsme, du Christianisme et du Mahométisme ; ce qui a fait conjecturer à Spencer qu’elle est récente, et ne surpasse point le temps de Mahomet, puisqu’on n’en trouve le nom ni la religion marqués dans aucun auteur ancien, ni grec ni latin, ni dans aucun autre ouvrage écrit avant l’alcoran. Voyez SABÉENS.

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SABÉENS, les, (Géogr. anc.) ancien peuple de l’Arabie heureuse. Passages de différents auteurs anciens sur ce peuple. XIV. 458. a.

Sabéens, sectateurs du sabaïsme, voyez ce mot.

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[Étienne FOURMONT (1683-1745) : Extraordinaire ! 20 langues, dont l’Arabe… et le Chinois !

Thomas HYDE (1636-1703).

Humphry PRIDEAUX (1648-1724) :

- traduit Maïmonide.

- 1697 : Vie de Mahomet.

- 1715-1718 : Histoire des Juifs (immense succès).

 

Régis Debray et autres peuvent s’aligner !] (F. Malot)

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Jean Baptiste

Jean Baptiste

Détail de la Chaire de l’évêque Maximien.
Ivoire du 6ème siècle

Le Testament Chrétien

Le Testament Chrétien

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Le couple Paul-Pierre est le cœur du Testament (le Témoignage, l’Évangile). Notons qu’il n’y a aucun Évangile au nom de ces deux colonnes ! Ensuite, l’image officielle, à Rome comme à Moscou, est “Pierre et Paul”. Mais notre Église prétend mieux connaître le christianisme qu’il ne se connaît lui-même, étant Réaliste, c’est-à-dire Historiste en pratique. C’est bien l’apôtre “des Gentils”, Paul, qui décida de tout ! Avec le “Logos” du IVème Évangile (Jean) ! Ça ne se discute pas. L’histoire de la primauté de Pierre (bien comprise !) n’est pourtant pas une tricherie ; elle a ses raisons : d’abord la nécessité que J.C. accomplisse les prophéties juives, de la Bible ; ensuite, l’importance réelle à donner à l’Église “épouse du Christ”. Cela n’empêche pas qu’il faut réserver l’hégémonie à Paul. Inversement, le couple étant solide, on aura nécessairement des “revanches” révolutionnaires passagères de Pierre ; mais pas pour les raisons auxquelles on s’attendrait ! L’Église n’est pas que le Gouvernement des clercs, c’est aussi son contraire : l’Assemblée des saints. Il y a des moments où le christianisme aura besoin de se le rappeler !

Le couple Luc-Matthieu. En parlant de Luc, je pense plus aux Actes des Apôtres qu’à l’Évangile de ce nom (ou bien les deux groupés). Ce couple vraiment Évangélique lui, appuie celui de Paul-Pierre. À quel titre ? C’est pour l’“histoire”, le Témoignage strict (événements, miracles, modèles d’action). Ces deux récits se complètent contradictoirement, comme les deux colonnes qui leur correspondent.

Le couple Jean-Apocalypse. Ce couple est fondamental, et Luc-Matthieu, bien que “populaire”, est un couple secondaire par comparaison (mais les DEUX couples forment une paire plus large dont les éléments respectifs s’appuient admirablement). Jean et l’Apocalypse sont évidemment opposés, comme l’hellénisme s’oppose au judaïsme. Mais ils sont solidaires comme Dogme (doctrine) d’un côté et Mystique (eschatologie) de l’autre.

Le couple Simon-Baptiste. Avec ce couple, on sort du Canon au sens strict. Les chrétiens ne peuvent imaginer un tel couple, Jean-Baptiste étant donné comme le “Précurseur”, et Simon le Mage une recrue discutable. Mais la réalité est la réalité ! Et la réalité montre l’importance MAJEURE qu’eut le couple Simon-Baptiste dans le pré-christianisme, importance que le Canon même doit souligner. Les “foules” suivaient, respectivement en Samarie et en Juda, Simon et Baptiste. Quant à Simon, on sait qu’il fut tenu pour un “dieu” (divin) à Rome du temps de Claude. Rome est bien sûr plus portée vers un sauveur Grec que Jérusalem. C’est Luc, le paulinien, qui s’attarde sur Simon ; et c’est Pierre l’“ennemi” de Simon. C’est Philippe, un Grec prosélyte s’il en est, qui baptise Simon. Longtemps, au moins jusqu’en 150 P.C., Baptistes et Simoniens (multipliés chacun en mille courants) occuperont le terrain (et resteront indéracinables à la périphérie du christianisme devenu adulte). Irénée (185 P.C.) et Hippolyte (220 P.C.), dans leurs sommes “anti-hérésie”, pourchassent encore principalement, non pas des déviations du christianisme, mais du panthéisme pré-chrétien (en tout cas ne distinguant pas les deux choses).

Notons : Paul s’unira à Pierre contre Simon, et Pierre s’unira à Paul contre Baptiste.

(Je m’attarde sur Baptiste à propos des Sabéens.)

F. Malot

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Symbole [1] d’Hippolyte

(+ 225)

L’Histoire ne fait pas de cadeau : on ne peut se prévaloir que de ses mérites réels. Il faut donc le clamer haut et fort et définitivement : durant tout le Christianisme Impérial, jusqu’en 740 au bout du compte, il n’y eut aucun “Pape”. Régler cette affaire n’amoindrit pas le Christianisme Latin, “papal” précisément, dont la magnifique carrière – jusqu’en 1340 – se trouve ainsi au contraire placée dans son vrai cadre, avec sa vraie richesse.

Malgré la grandeur de la Rome hellène – et à cause d’elle en vérité –, le centre du Catholicisme “grec” fut Constantinople du début à la fin. Ce Catholicisme avait des Patriarches sous l’autorité de l’Empereur. La ville nouvelle de Constantinople n’avait pas de passé Apostolique, mais à cause de son importance politique, elle fut élevée au rang de Patriarcat, comme Alexandrie, Antioche, et Jérusalem (cette cité à titre honorifique, et non point comme foyer théologique, vu la pauvreté de la contrée). En tout cas, il n’y eut jamais de Patriarcat romain, la vieille Rome renversée étant sous la pression des “barbares”, et c’est à Carthage (partie intégrante de l’Italie) qu’on eut les premiers Pères Latins de marque. Bref, Rome privée de Patriarche n’eut qu’un évêque simple, qu’on nommait partout “papa”, Pape.

Quand le Catholicisme Impérial devint “majeur”, et quand il arriva vers sa fin, on eut à deux reprises un Évêque de Rome, “Grec” dans les deux cas, maltraité par la tradition papale.

- Le 1er est Hippolyte (225), qu’on a “oublié” dans la liste des “successeurs de Pierre” !

- Le 2ème est Honorius 1er (625-638), anathémisé en 680 (Constantinople III). Jusqu’au 16ème siècle, on “oublia” son nom. Les Papes, à leur intronisation, devaient prononcer l’anathème contre les Patriarches “hérétiques” Serge, puis Pyrrhus (610-638) auxquels l’Évêque de Rome Honorius est associé. (L’affaire concernait le “schisme d’Aquilée” (556-630) : Aquilée – près de Trieste – et Milan se firent la guerre pendant 75 ans à propos des décisions du concile Constantinople II, en 553 sous Justinien. J’ai eu un mal de chien pour glaner ces bribes précisant ledit schisme !).

Le malheureux HIPPOLYTE avait le malheur d’être un grec cultivé, Évêque parmi les rustres romains ! Son Symbole est splendide. Il mérite bien d’être remis en lumière.

Quel chemin parcouru, depuis les Apôtres panthéistes (jusqu’à 117) ; et même quelle nouveauté après les Pères de l’Église véritable, mais encore dans la Défensive (jusqu’à 190) !

Auprès du Symbole d’Hippolyte, le Nouveau Testament apparaît comme un simple Mémorial d’Anciens Combattants panthéistes (c’est comme quand nous-mêmes sommes émus par le souvenir de Babeuf et de Godwin, Février 1848 et la Commune).

Cette fois, avec Hippolyte, on est encore sous domination païenne, mais dans la phase Offensive. Marcion et Montan, les hérésies hellénisantes et judaïsantes, sont dépassés ; nous sommes à l’âge de Tertullien/Origène, à l’heure d’une Armée Orthodoxe levée contre le Paganisme, une Doctrine sûre d’elle-même, seulement stimulée par ses deux courants Empiriste et Idéaliste complémentaires et alternatifs ; avec un Programme bref, précis et complet, pénétré de rigueur “grecque”.

F. Malot

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Date de la composition des PHILOSOPHUMENA ou réfutation de toutes les hérésies :

Les Philosophumena n’ont été écrits qu’un certain temps après la mort de Calliste, survenue en 222. C’est ce qui ressort de ces paroles du livre IX, chap. 12 : “Telles sont les institutions de ce merveilleux Calliste. Son école dure encore et garde les habitudes et la tradition du maître… Ses sectateurs ont reçu de lui leur surnom, et, à cause de Calliste, l’initiateur de ces œuvres, sont appelés Callistiens.” D’autre part Hippolyte, comme nous le verrons plus loin, a été déporté en Sardaigne, où il est mort, après l’avènement de Maximin le Thrace en 235. La composition des Philosophumena se place donc nécessairement entre les années 222 et 235 et plus probablement entre 225 et 233 ou 234.

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Hippolyte de Rome :
exposé de la doctrine orthodoxe

(LE COMMENCEMENT MANQUE)

Sur l’ordre de Dieu, Abraham quitta la ville de Charran, en Mésopotamie, pour aller s’établir dans le pays qu’on appelle maintenant la Palestine et la Judée et qu’on appelait alors la terre de Chanaan. Nous avons traité de ce pays en détail et avec soin dans d’autres ouvrages [2]. Telle est l’origine des accroissements du peuple juif en Judée. Ce pays reçut son nom de Juda, le quatrième des enfants de Jacob ; et ce royaume fut appelé le royaume de Juda, parce que c’est de Juda que sortit la famille royale.

Généalogies d’Abraham, d’Isaac, de Jacob et des différents patriarches. – Après le déluge universel, les trois fils de Noé : Sem, Cham et Japhet, repeuplent la terre. Ils engendrent soixante-douze fils, qui deviennent les pères des soixante-douze peuples.

Ces anciens patriarches étaient des hommes pieux et ils sont très antérieurs aux nations qui ont cultivé la philosophie.

Mettez-vous donc à leur école, Grecs, Égyptiens, Chaldéens et vous, hommes de toutes races ; apprenez de nous, qui sommes les amis de Dieu, à connaître ce Dieu et la création bien ordonnée dont il est l’auteur. Nos discours ne s’inspirent pas du vain souci de l’élégance, mais du désir de démontrer Dieu grâce à la connaissance que nous avons de la vérité et à la sagesse que nous pratiquons.

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Dieu est un ; il est le premier (de tous les êtres) ; il était seul ; c’est lui qui est le créateur et le maître de toutes choses. Rien n’existait en même temps que lui, ni chaos infini, ni eau immense ou terre ferme, ni air dense, ni feu brûlant, ni souffle léger, ni voûte azurée du vaste ciel, mais il était unique, seul avec lui-même [3]. Quand il le voulut, il fit les êtres lesquels n’existaient pas auparavant ; seulement il voulut les faire comme ayant la connaissance des choses qui seraient : car il a en lui la prescience [4]. Il créa d’abord, pour les êtres à venir, des principes différents : le feu et le souffle, l’eau et la terre ; c’est avec ces divers principes qu’il forma ses créature. Il fit les unes d’une seule substance ; les autres, il les composa de deux, de trois, de quatre éléments réunis. Les êtres qui n’ont qu’une seule substance sont immortels, car ils ne sont pas susceptibles de dissolution, ce qui est un ne pouvant jamais être dissous. Les êtres composés de deux, trois ou quatre éléments sont sujets à la dissolution ; voilà pourquoi on les qualifie de mortels : car, ce qu’on appelle mort, c’est la dissolution des composés. Pour le moment, cette réponse suffira aux gens bien pensants ; s’ils désirent en savoir davantage et scruter les essences des êtres ainsi que les causes de la création en général, ils n’ont qu’à lire le livre que nous avons composé Sur l’essence du Tout [5]. Mais maintenant il suffit d’exposer ces causes ; c’est pour ne les avoir pas connues que les Grecs ont glorifié dans d’élégants discours, les parties de la création et ignoré le créateur. Leurs doctrines ont servi de point de départ aux hérésiarques : ceux-ci, par des discours semblables, ont donné une forme nouvelle aux enseignements antérieurs (des philosophes) et ont constitués ainsi leurs risibles hérésies.

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Donc ce Dieu unique et (qui règne) sur toutes choses engendre tout d’abord, par sa pensée, un Logos, non un Logos au sens de voix, mais raison immanente de l’univers [6]. C’est le seul qu’il ait engendré de l’être : car le Père lui-même était l’être [7] et c’est du Père qu’est sorti l’auteur de tous les êtres créés, le Logos, portant en lui-même le vouloir de celui qui l’a engendré et n’ignorant pas la pensée du Père. Car, au moment même où il sortait de celui qui l’a engendré, devenant ainsi son premier-né, sa voix, il possédait en lui-même les idées conçues dans l’esprit du Père : aussi, le Père ordonnant que le monde fût créé, le Verbe a-t-il accompli une à une toutes les choses qui plaisaient à Dieu.

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Les êtres qui se multiplient par voie de génération, il les fit mâles et femelles. Tous ceux qui sont destinés au service et à l’usage, il les créa ou mâles n’ayant pas besoin de femelles [8], ou ni mâles ni femelles. En effet, les premiers éléments de ces êtres, le feu et le souffle, l’eau et la terre, tirés du néant, ne sont ni mâles ni femelles ; de chacun de ces éléments ne peuvent provenir des êtres mâles et des êtres femelles, à moins que, d’après la volonté et sur l’ordre de Dieu, le Logos ne les fasse tels. Je reconnais que les anges sont tirés du feu et je déclare qu’ils n’ont pas avec eux de femelles. Le soleil, la lune et les étoiles proviennent pareillement du feu et du souffle et je crois qu’ils ne sont ni mâles ni femelles. C’est de l’eau, à mon avis, que sont sortis les animaux qui nagent et ceux qui volent ; ils sont mâles et femelles : ainsi l’a ordonné Dieu, qui a voulu que l’élément humide fût fécond. Les reptiles, les bêtes sauvages et les animaux de toute espèce issus de la terre sont pareillement mâles et femelles : ainsi le demandait la nature de ces êtres créés. Dieu a fait tout ce qu’il a voulu. Il a créé ces choses par le Verbe, et elles ne pouvaient se faire autrement qu’elles n’ont été faites. Il les a faites quand et comme il a voulu, puis il a donné à chacune d’elles un nom pour la caractériser. Après cela, il créa le chef de toutes choses, le formant de toutes les substances composées.

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Il n’échoua pas en voulant faire un dieu [9] ; il ne voulait pas non plus faire un ange, – que je ne vous trompe pas, – mais un homme. Car, s’il avait voulu te faire dieu, il le pouvait : tu as l’exemple du Logos [10] ; mais, voulant faire un homme, il t’a fait homme. Si tu veux, toi aussi, devenir un dieu, sois soumis à ton créateur et ne lui résiste pas maintenant, afin que, ayant été trouvé fidèle dans les petites choses, tu puisses t’en voir confier de grandes [11]. Le Logos de Dieu est le seul être qui soit issu de Dieu ; voilà pourquoi, lui aussi, il est Dieu, étant substance de Dieu. Quant au monde, il est tiré du néant ; voilà pourquoi il n’est pas dieu ; il est susceptible d’être détruit au gré du créateur.

Le Dieu créateur ni n’a fait, ni ne fait de mal ; il n’a rien fait que de beau et de bon ; car celui qui crée est bon. Mais l’homme créé était un être vivant maître de lui-même ; il ne possède pas un esprit qui commande, il ne règne pas sur toutes choses par la pensée, l’autorité et la force, mais il est esclave et il a tout contre lui [12]. C’est l’homme qui, par le fait même de son indépendance, produit dans la suite le mal. Le mal est accompli par accident, il n’existe pas si tu ne le fais pas. Car ce qu’on appelle le mal consiste à vouloir quelque chose qu’on sait être mauvais. Le mal n’existe pas dès le principe, il survient plus tard. L’homme étant libre, Dieu lui a imposé une loi, non sans motif : car si l’homme n’était pas maître de vouloir et de ne pas vouloir, pourquoi lui imposer une loi ? La loi n’est pas faite pour l’animal sans raison, mais le frein et le fouet. À l’homme au contraire on donne des commandements, en ajoutant des sanctions pour l’exécution ou la non-exécution de l’ordre reçu. Une loi fut imposée à l’homme, par le ministère d’hommes justes, dès les plus anciens temps.

Plus près de nous par le ministère de Moïse, cet homme pieux et aimé de Dieu dont nous avons déjà parlé, fut donnée une loi pleine de gravité et de justice. Tout est régi par le Logos de Dieu, le Fils premier-né du Père, la voix qui apporte la lumière avant l’étoile du matin [13].

Ensuite parurent des hommes justes, amis de Dieu ; ils furent appelés prophètes, parce qu’ils prédisaient l’avenir. Ils ne parlèrent pas à une seule époque ; mais, à travers toutes les générations, ils firent entendre leur voix pour émettre des prédictions dont la vérité était facile à démontrer, et cela non seulement quand ils répondaient à leurs contemporains, mais encore quand ils prophétisaient les événements qui devaient arriver dans la suite des générations. En racontant les choses passées, ils les rappelaient au souvenir des hommes ; en signalant les choses présentes, ils tâchaient de secouer la nonchalance ; en prédisant l’avenir, ils frappaient de terreur chacun de nous : car, voyant s’accomplir des choses prédites depuis longtemps, nous attendons également les événements annoncés pour l’avenir.

Telle est notre croyance, ô vous tous, hommes. Nous ne nous laissons pas convaincre par de vaines paroles, ni entraîner par des mouvements imprévus du cœur, ni fasciner par l’éloquence persuasive de beaux discours, mais nous ne restons pas incrédules devant des paroles inspirées par la puissance divine. Ces prescriptions aussi, c’est Dieu qui les donnait au Logos, et le Logos faisait entendre sa voix pour les promulguer ; par l’organe des prophètes [14], il s’efforçait de détourner l’homme de la désobéissance ; il ne le réduisait pas en esclavage par la violence et la contrainte, mais l’appelait à la liberté par un choix volontaire.

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Ce Logos, le Père l’a envoyé plus tard non plus parler par l’organe d’un prophète, – car Dieu ne voulait pas que le Logos fût simplement conjecturé d’après une obscure prédication [15], – mais se manifester en personne aux yeux (des hommes). Dieu, dis-je, l’a envoyé afin que le monde fût frappé de trouble et de confusion à la vue de celui qui ne dictait plus des ordres par la bouche des prophètes et qui n’effrayait plus une âme par l’apparition d’un ange, mais qui était présent en personne et parlait lui-même. Nous savons que ce Verbe a pris un corps d’une vierge, qu’il a porté le vieil homme en lui donnant une nouvelle façon, qu’il a traversé tous les âges de la vie pour se donner lui-même en loi à tout âge, pour proposer à tous les hommes, comme but à atteindre, l’homme qui est en lui [16] et pour prouver par son exemple que Dieu n’a rien créé de mauvais et que l’homme est libre, capable de vouloir et de ne pas vouloir, maître de prendre l’un ou l’autre parti. Nous savons que cet homme est fait de la même pâte que nous ; car, s’il n’était pas formé de la même pâte, c’est en vain qu’il nous ferait une loi de l’imiter comme notre maître. Si cet homme, en effet, est d’une autre substance que nous, comment peut-il me commander, à moi qui suis faible par nature, d’agir comme lui ? Où sont alors sa bonté et sa justice ? Mais, pour bien faire voir qu’il n’était pas différent de nous, il a supporté la fatigue, il a voulu avoir faim, il n’a pas refusé d’avoir soif, il s’est reposé en dormant, il n’a pas repoussé la souffrance, il s’est soumis à la mort et a rendu manifeste sa résurrection. Dans ces différentes circonstances, il a offert comme prémices l’homme qui est en lui (sa propre humanité), afin que toi, dans la souffrance, tu ne te décourages pas, mais que, reconnaissant que tu es un homme, tu attendes, toi aussi, ce que le Père a donné à cet homme-là [17].

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Telle est la véritable doctrine sur la divinité, ô hommes Grecs et Barbares, Chaldéens et Assyriens, Égyptiens et Libyens, Indiens et Éthiopiens, Celtes et Latins chefs d’armées, et vous tous, habitants de l’Europe, de l’Asie et de la Libye. Je me fais votre conseiller, moi, disciple du Logos qui aime les hommes et aimant moi-même les hommes. Accourez tous et venez recevoir de nous la connaissance du véritable Dieu et de sa création bien ordonnée. Ne vous attachez pas aux sophismes d’artificieux discours, ni aux vaines promesses des hérétiques plagiaires, mais à l’auguste simplicité de la vérité sans emphase. C’est par la connaissance de cette vérité que vous échapperez à la menace imminente du feu du jugement, au sombre spectacle du ténébreux Tartare, non éclairé d’en haut par la voix du Logos, aux flammes du bouillonnant et intarissable étang de la géhenne, au regard éternellement menaçant des anges du châtiment qui règnent dans le Tartare et au ver qui fouille sans repos dans la corruption du corps comme pour y chercher sa nourriture [18]. Grâce à la connaissance du véritable Dieu [19], tu échapperas à ces malheurs et tu auras un corps immortel et incorruptible comme l’âme elle-même ; tu recevras en partage le royaume des cieux pour avoir, pendant ta vie terrestre, reconnu le roi céleste ; tu seras le familier de Dieu et le cohéritier du Christ, désormais affranchi des passions, des souffrances et des maladies. Car tu es devenu un dieu. Toutes les épreuves que tu as subies étant homme, Dieu te les a envoyées parce que tu es homme ; tous les attributs qui conviennent à un dieu, Dieu a promis de te les donner quand tu auras été déifié ayant été engendré à l’immortalité. C’est la maxime : “Connais-toi toi-même”, en connaissant le Dieu qui t’a fait. Car, pour l’homme que Dieu appelle, se connaître soi-même a pour conséquence d’être connu de Dieu [20]. Ne soyez donc pas ennemis de vous-mêmes, ô hommes ; n’hésitez pas à revenir en arrière. Car Christ est le Dieu qui règne sur toutes choses, qui a ordonné de purifier les hommes du péché, qui a fait du vieil homme un homme nouveau ; qui, dès le principe, a appelé l’homme son image, montrant par là sa tendresse pour toi. Si tu prêtes l’oreille à ses augustes commandements, si, par ta bonté, tu imites la sienne, tu seras semblable à lui et il te comblera d’honneurs. Car Dieu n’est pas pauvre, lui qui t’a fait dieu, toi aussi, pour sa gloire.

Hippolyte de Rome

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Mentalités en Arabie

(600 P.C.)

Mentalités en Arabie

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L’Islam Classique

D. et J. SOURDEL (1983)

La vie de famille était essentiellement régie par les préceptes du texte révélé, même si ceux-ci n’avaient fait souvent que consacrer, en les modifiant, bien des coutumes antérieures. L’autorisation de la polygamie, illimitée quand il s’agissait de concubines esclaves, mais assortie cependant de l’interdiction coranique de prendre plus de quatre épouses légitimes, en constituait un des éléments majeurs, dominant le comportement individuel comme l’organisation intérieure de la cité musulmane où survivaient ainsi certains usages de l’Arabie préislamique.

Sans doute quelques orientalistes ont-ils émis l’hypothèse contraire en supposant qu’à Muhammad revenait l’originalité d’avoir introduit cette législation polygame dans une société auparavant matriarcale, et ceci à la suite des pertes subies par les croyants durant les premiers combats et du nombre croissant des veuves sans soutien qui en était résulté.

Mais leur hypothèse ne semble reposer sur aucun indice sérieux. En tout état de cause, Muhammad paraît avoir cherché à améliorer plutôt qu’à diminuer encore la situation ancienne de la femme en Arabie, jugée par lui trop précaire.

D. et J. SOURDEL (1983)

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Mahomet – Le Koran

Traduction nouvelle, faite sur le texte en arabe par M. Kasimirski,
Interprète de la Légation française en Perse –1877.

Chapitre IX : l’Immunité ou le Repentir [21]

Donné à Médine. – 130 versets.

Les juifs disent : Ozaïr est fils de Dieu.

Ozaïr est le même qu’Esdras. C’est cet homme, disent les commentateurs, que Dieu avait fait mourir, et qu’il ressuscita au bout de cent ans. Ozaïr ressuscité récita aux juifs tout le Pentateuque qu’il savait par cœur avant de mourir, ce qui fit dire aux juifs que, pour le faire, il fallait qu’il fût fils de Dieu.

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Le Koran. Chapitre (Sourate) IX :

28. O croyants ! ceux qui associent (d’autres divinités à Dieu) sont immondes ; cette année expirée, ils ne doivent point s’approcher de l’oratoire sacré. Si vous craignez l’indigence, Dieu vous rendra riches par les trésors de sa grâce. Il est sage et savant.

29. Faites la guerre à ceux qui ne croient point en Dieu ni au jour dernier, qui ne regardent point comme défendu ce que Dieu et son apôtre ont défendu, et à ceux d’entre les hommes des Écritures qui ne professent pas la croyance de la vérité. Faites-leur la guerre jusqu’à ce qu’ils payent le tribut, tous sans exception, et qu’ils soient humiliés.

30. Les juifs disent : Ozaïr est fils de Dieu [22]. Les chrétiens disent : Le Messie est fils de Dieu. Telles sont les paroles de leurs bouches, ils ressemblent en les disant aux infidèles d’autrefois. Que Dieu leur fasse la guerre [23]. Qu’ils sont menteurs !

31. Ils ont pris leurs docteurs et leurs moines, et le Messie, fils de Marie, plutôt que Dieu, pour leurs seigneurs [24] ; et cependant il ne leur a été ordonné que d’adorer un seul Dieu, hormis lequel il n’y a point d’autre dieu. Loin de sa gloire les divinités qu’ils lui associent !

32. Ils veulent éteindre la lumière de Dieu avec leurs bouches ; mais Dieu ne veut que rendre sa lumière plus parfaite, dussent les infidèles en concevoir du dépit.

33. C’est lui qui a envoyé son apôtre avec la direction et la vraie religion, pour élever celle-ci au-dessus de toutes les autres religions, dussent les idolâtres en concevoir du dépit.

34. O croyants ! un grand nombre de docteurs et de moines consument les biens des autres [25] en choses vaines, et détournent les hommes du sentier de Dieu. Annonce un châtiment douloureux à ceux qui amassent l’or et l’argent, et ne le dépensent point dans le sentier de Dieu.

35. Le jour où le feu de la géhenne sera allumé sur leurs têtes, des marques brûlantes seront imprimées avec cet or et cet argent sur leurs fronts, sur leurs flancs et sur leurs reins, et on leur dira : Voilà ce que vous avez vous-mêmes amassé pour vous. Goûtez ce que vous avez amassé.

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Jean 14 : 16

15- “Si vous m’aimez, vous observerez mes commandements ; 16- et moi j’adresserai une demande au Père, et il vous donnera un autre ASSISTANT *, afin qu’il soit avec vous pour toujours, 17- l’esprit de la vérité, que le monde ne peut pas recevoir, parce qu’il ne le voit ni ne le connaît.”

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* Dans la Septante (en grec) : PARAKLET = Avocat, Protecteur (auprès du Père), traduit ici par “assistant”.

- Les chrétiens en firent le Saint-Esprit, qui inspire l’Église “épouse du Christ”.

- Pour l’Islam, c’est l’annonce, par Jésus Christ lui-même, d’un Envoyé final, Mahomet. Ils disent : le PARACLETOS grec est une corruption intentionnelle de PERICLYTOS, “le Glorieux”, que l’Arabe traduit AHMED, et que Jésus annonce Sourate 61, v. 6.

F. Malot

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Manî

(216-277)

Fils de Fataq Babâk et de Meïs Ashghâniya.

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La Sagesse et les bonnes œuvres ont toujours été apportées avec une suite parfaite, d’une époque à l’autre, par les Messagers de Dieu. Ainsi, elles vinrent en leur temps par le Prophète nommé Bouddha dans les pays de l’Inde, en un autre par Zarâdusht (Zoroastre) dans la contrée de la Perse, en un autre par Isa (Jésus) dans l’Occident. Après quoi, la Révélation est arrivée et cette Prophétie s’est manifestée en ce dernier âge par moi, Mani, Messager du Dieu de Vérité en terre de Babylonie.”

Manî

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Shâpûr accorda plusieurs entretiens à l’hérésiarque – le Képhalaïon LXXVI (p. 183, 13 s.) en signale trois – au cours desquels il s’initia à la doctrine. Peut-on parler, comme on l’a fait, de “conversion” ? Rien de moins certain. Il est probable que le Grand Roi n’était pas un personnage particulièrement sensible aux problèmes de Dieu et de la vie éternelle, ou du moins l’était-il à sa manière. Mais, habile politique, il avait peut-être des raisons de penser que le manichéisme offrait des avantages supérieurs à ceux du mazdéisme pour la réalisation de ses desseins. La doctrine de Mani ne se présentait-elle pas comme un syncrétisme, ouvert aux grands courants religieux, et ne pouvait-elle ainsi servir de moyen pacifique pour pénétrer les empires voisins ? N’est-ce pas Mani lui-même qui, dans le Shâbuhragân, se proclame comme le Sceau des Prophètes ?

Quand Shâpûr mourut, ses deux fils qui lui succédèrent, en de courts règnes aux dates incertaines – Hormizd Ier (272-273) et Bahrâm Ier (273-276) –, héritaient d’un immense territoire.

Mani avait été témoin de la prodigieuse ascension de l’Iran en moins d’un demi-siècle et il pouvait dire : “Il y a quatre grands empires dans le monde : le premier est l’Empire de Babylone et de la Perse ; le deuxième est l’Empire romain ; le troisième est l’Empire des Axoumites [quelle place est donnée alors à l’Éthiopie-Yemen !…] ; le quatrième est l’Empire de la Chine.”

Il est probable que, lors de la première persécution qui sévit contre la secte, à l’époque de Bahrâm Ier, une partie de ses adeptes, habitant les zones orientales de l’Empire sassanide, se réfugièrent soit en Mésopotamie romaine, où la population parlait la même langue [Araméen], soit en Syrie, qui semble avoir été dès lors le cœur de l’expansion manichéenne. Il faut en effet souligner l’importance du syriaque dans la diffusion de la Parole. C’est en cette langue que le Prophète avait déjà écrit la plupart de ses livres ; au Fayoum même, des documents syriaques ont été relevés à côté de textes coptes, dont certains d’ailleurs sont tirés du syriaque. Enfin le dernier Codex manichéen qui nous est connu, provenant d’Égypte, est la traduction grecque d’un original syriaque.

Les polémistes catholiques qui attaquèrent l’“hérésie” montrent assez quelles furent les régions où elle s’implanta : Eusèbe de Césarée, Eusèbe d’Émèse, Georges de Laodicée, Diodore de Tarse, Jean Chrysostome aussi, qui se déchaînait avec la brillante rhétorique chrétienne qu’on lui a reconnue, contre les Manichéens, ces “chiens muets et enragés”. Les “hérétiques” toutefois ne rencontrèrent pas que des ennemis en Palestine et en Asie Mineure. À Antioche, le sophiste Libanius prit leur défense : “Ils ne font de mal à personne mais d’aucuns leur font du mal.” Il est vrai que Libanius était païen.

Le manichéisme pénétra également en Arabie et c’est de là qu’il passa en Égypte, où il devait laisser les témoignages les plus impressionnants de son influence. Sans doute, les communautés manichéennes étaient-elles très vivantes et profondément enracinées. On les trouvait non seulement dans les grands centres cosmopolites comme Alexandrie, où Athanase ne manqua pas de polémiquer aussi contre elles, mais particulièrement dans la vallée du Nil.

En même temps que monte l’étoile du grand mage Kartêr dans le ciel d’Iran, on en voit apparaître les dramatiques conséquences, quand le haut dignitaire de l’Église établie fait état de son zèle inlassable et de ses services :

“Et moi, Kartêr, depuis le commencement, pour les dieux et les rois et pour ma propre âme j’ai éprouvé grande peine et désagrément ; beaucoup de feux et de mages dans l’Empire d’Iran j’ai rendus prospères. Et dans l’Empire d’Aniran aussi (…).

Les doctrines d’Ahriman et des démons, de l’Empire furent chassées. Juifs, bouddhistes, brahmanes, nazaréens, chrétiens, maktaks et zandiqs (= Manichéens), dans l’Empire furent abattus.”

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Au milieu du 4ème siècle des Ariens, poursuivis par le zèle redoutable de l’évêque d’Alexandrie, Athanase, et craignant de faire les frais d’une accusation d’hérésie devant les tribunaux impériaux, s’adressaient ainsi à Constance : “Si cela devait arriver, de grâce, veille toi-même à ce qu’on ne nous prenne pas pour des Manichéens !”

Être confondu avec la secte maudite, voilà bien le pire sort qui pouvait menacer un groupe schismatique ou hérétique. Quel que soit par ailleurs son anachronisme, la comparaison suivante traduit assez bien l’opposition des fidèles de la Catholica et même des membres de groupements dissidents, tels les Donatistes africains, vis-à-vis des Manichéens : “Ils étaient les bolcheviks du 4ème siècle, une cinquième colonne venue de l’étranger pour noyauter l’Église chrétienne”.

Mani et la tradition manichéenne,
François Decret, Seuil – 1974

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Mazdak (470-524)

De même que la foi éclectique de Mani marqua le début de la dégradation du système politique des Sassanides, le mouvement de Mazdak annonça la chute inévitable de l’Empire Sassanide. Mani arriva une génération après l’établissement de la dynastie sassanide en Perse ; Mazdak apparut vers la fin de cette dynastie, cent ans environ avant le renversement de l’Empire par les Arabes.

Mazdak se situe sans aucun doute dans la continuité de Mani, car son œuvre fut à la fois religieuse et sociale. Mais sa théologie était plus universelle et optimiste ; ne croyant pas à la prédestination, il comptait sur des solutions sociales pour vaincre “les forces des ténèbres”. Il prêchait aussi un idéal de vie élevé : il mettait l’accent sur la retenue et la renonciation aux plaisirs des sens, et préférait l’enrichissement spirituel à la richesse matérielle.

C’est sous le règne de Kavad (488-531), dans une société reposant sur un système de castes, avec de profondes inégalités sociales, ruinée par les guerres incessantes, les famines et les impôts écrasants, et humiliée par les défaites et les tributs à payer, que Mazdak apparut. S’appuyant sur le mécontentement populaire, Mazdak contesta les immenses privilèges des nobles et du clergé zoroastrien. Dépassant l’idée d’une société égalitaire, il prêchait une communauté complète des biens, y compris des femmes. Les biens et les femmes étant la source de la majorité des conflits, leur propriété collective ne pouvait que réduire la violence. Les paysans, les artisans et les démunis en général firent bon accueil aux thèses de Mazdak et se rangèrent à ses côtés. En quelques mois, ses partisans se comptaient par centaines de milliers.

Kavad, conscient du pouvoir excessif des nobles et du clergé, se montra ouvertement favorable aux thèses de Mazdak ; il promulgua plusieurs lois restreignant les privilèges des nobles et introduisit des réformes sociales sans précédent. Le soutien du roi encouragea les mazdakistes qui s’emparèrent des greniers (à grains), des entrepôts de marchandises, des résidences des riches et de leurs harems. Les nobles et le clergé réagirent violemment et Kavad fut déposé.

Quand, trois ans plus tard, Kavad remonta sur le trône, avec l’aide des Ephtalites (Huns blancs) et de quelques nobles sympathisants des mazdakistes, il fut effrayé par l’ampleur du pouvoir du mouvement de Mazdak. Et, tout en restant attaché à la vision religieuse du mouvement mazdakiste, il fit alliance avec le clergé. Lorsqu’une nouvelle famine menaça, Mazdak encouragea ses partisans à s’attaquer aux réserves des nobles. Le clergé zoroastrien et les nobles anti-mazdakistes firent appel à Khosrou Anushiravan, fils cadet de Kavad, qui persuada son père de se débarrasser des mazdakistes. Prétextant un débat religieux, Anushiravan réunit Mazdak et ses adeptes dans le jardin royal où ils furent enterrés vivants. En 528, toujours sous le règne de Kavad, Ctésiphon connut un grand massacre de mazdakistes ; une vague de persécutions se poursuivit dans les provinces, qui se renouvela au début du règne de Khosrou. Le mouvement devint clandestin, mais survécut, en particulier hors des villes.

Le mouvement mazdakiste avait duré environ 30 ans (494-524), mais le mazdakisme ne mourut pas avec Mazdak. Il se perpétua, par exemple, sous l’Islam avec Abou Mouslim et les Kharedjites, et conduisit le Persan Rostem à fonder en Afrique du Nord le royaume berbère de Tahert, où l’égalitarisme musulman des origines, le gouvernement par la vertu et la pauvreté viendront se fondre avec la tradition communautaire des Berbères.

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Muezzin

(mouâdzdsin) = Héraut

Le Muezzin chante l’Annonce (EZANN) des 5 prières (NAMAZ, offices) obligatoires, toujours accompagnées d’ablutions :

- À l’aurore ;

- À midi ;

- À 15 heures ;

- Au crépuscule ;

- Au milieu de la nuit.

Le 1er pilier de la Foi. Le fidèle peut réciter deux de ces oraisons en même temps, ce qui réduit les prières à trois. Durant le mois du ramadan, les appels sont doublés ; mais la prière du second appel est surérogatoire (de pure dévotion).

Du haut du minaret de la mosquée voisine, le Muezzin se porte successivement aux quatre points cardinaux et lance :

“Il n’y a de dieu que Dieu ; Mahomet est son Prophète.

Dieu est très grand ! (3 fois) ;

J’atteste qu’il n’y a point d’autre Dieu qu’Allah ! (2 fois) ;

J’atteste que Mahomet est le Prophète de Dieu ! (2 fois) ;

Venez au temple du salut ! (2 fois) ;

(À l’aurore, on ajoute : “La prière est préférable au sommeil !” [26])

Dieu est grand ! (2 fois) ;

Il n’y a de dieu qu’Allah !”

Longtemps, on préféra des vieillards aveugles comme muezzins, parce que du haut des minarets leur regard pouvait plonger sur les terrasses où les femmes prenaient le frais. La pureté légale est exigée pour s’acquitter de la fonction.

Les muezzins sont choisis pour la beauté de leur voix. Ils entonnent l’Annonce tournés vers La Mecque, les yeux fermés, les deux mains ouvertes et élevées, les pouces dans les oreilles. Dans cette position, ils parcourent à pas lent le CHURFÉ (la galerie). Le grand-chantre de la chapelle du sérail du sultan se nomme MUEZZIN-BACHI.

Mahomet remplit l’office de Muezzin à plusieurs reprises. À Médine, un “synode” décida que les croyants se réuniraient le Vendredi dans la maison d’Allah, ce jour étant celui du Jugement final. La nuit suivante, un membre vit un Ange monté sur le toit de la maison et prononcer l’Ezann. Mahomet, instruit par cette vision, chargea un Muezzin de crier l’Annonce du haut du toit de sa maison.

Larousse – 1874

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Les Statuts Gouvernementaux

Ou règles de droit public et administratif (1045)

(AHKÂM SOLTÂNIYYA)

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Abou-Hassan Ali MAWERDI

“Le Cadi des Cadis” – Bagdad 972-1058.

Al Mawerdi vécut à Bagdad durant la première moitié du 11ème siècle – il est mort en 1058.

Entré au service du Calife au moment où le califat musulman était irréversiblement affaibli par les diverses forces politiques qui établissaient leurs pouvoirs sur les parcelles de l’Empire arabe, (et notamment les émirs Bùyides qui avaient assujetti les Califes à leur autorité temporelle) le jeune Al Mawerdi mène de nombreuses négociations avec les princes voisins.

De formation théologique approfondie, il se voit confié la mission de rédiger un état des prérogatives du Calife sanctionnées par la loi religieuse. Ses Statuts Gouvernementaux seront cependant beaucoup plus que cela : Certainement la réflexion à la fois politique, religieuse, administrative et juridique la plus sérieuse qu’ait connu la pensée islamique sur le thème du pouvoir et du gouvernement.

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De la Capitation des “Protégés” sous les Califes et Sultans

De la Capitation :

La capitation et le kharâdj sont deux charges dont Allâh a frappé les polythéistes au profit des fidèles.

La djizya ou capitation, qui s’applique à la tête de chacun des assujettis, tire son nom de djezâ (rétribution, rémunération), soit parce qu’il s’agit d’une rémunération due à raison de leur infidélité, car elle leur est demandée avec mépris, soit parce qu’elle constitue une rémunération parce que nous leur avons fait quartier, car elle leur est demandée avec douceur. Cette redevance a pour base le texte divin : “Combattez ceux qui, parmi les hommes ayant reçu des livres révélés, ne croient point en Allâh ni au jour suprême, qui ne déclarent point interdit ce qu’Allâh et son Apôtre ont déclaré interdit et qui ne professent point la religion de vérité, jusqu’à ce qu’ils versent la capitation de leurs propres mains [27] et avec humiliation” (Koran, IX, 29). Quant aux mots “ceux qui ne croient point en Allâh”, les adeptes des Livres révélés reconnaissent bien qu’Allâh est unique, mais cette foi en Allâh peut s’entendre de deux manières : ou bien qu’ils ne croient point au Livre d’Allâh, c’est-à-dire au Koran,– ou bien qu’ils ne croient point en son Envoyé Mohammed, car l’aveu de la véracité des Envoyés c’est la foi en celui qui les envoie. Les mots “ni au jour suprême” peuvent aussi s’entendre de deux manières : ou bien qu’ils ne craignent point la menace du jour suprême, bien que reconnaissant la récompense et le châtiment,– ou bien qu’ils n’admettent point l’exactitude de la description qu’a faite Allâh des divers châtiments. Les mots “qui ne déclarent point interdit ce qu’Allâh et son Apôtre ont déclaré interdit” s’appliquent à celles de leurs prescriptions religieuses dont Allâh a prononcé l’abrogation,– ou bien à ce qu’Allâh a déclaré être pour eux soit licite soit interdit. Les mots “qui ne professent point la religion de vérité” s’appliquent soit aux passages de la Tôra et de l’Évangile parlant de suivre l’Apôtre, ce qui est l’explication de Kelbi, soit à la conversion à l’islam, ce qui est l’explication adoptée par la généralité. Les mots “parmi les hommes ayant reçu des livres révélés” s’entendent ou des fils de ceux qui ont reçu les livres révélés, ou bien de ceux chez qui se trouvent les livres révélés, car en figurant parmi les adeptes de ceux-ci ils en sont comme les fils. Les mots “jusqu’à ce qu’ils versent la capitation” veulent dire jusqu’à ce qu’ils la versent, ou, d’après d’autres, jusqu’à ce qu’ils la garantissent, car le fait qu’ils en prennent la responsabilité entraîne qu’ils doivent être respectés. Quant au mot “capitation”, les uns y voient un de ces mots à acceptions multiples dont nous ne savons ce qu’ils signifient que si l’explication nous en est donnée, et d’autres un de ces mots d’application générale qu’il faut prendre dans son sens habituel, réserve faite de la preuve qu’il a un sens spécial. Les mots “de leurs propres mains” peuvent signifier ou à raison de leur état de richesse et d’opulence, ou qu’il sont persuadés que nous avons vis-à-vis d’eux la force et le pouvoir nécessaires pour l’exiger. Les mots “et avec humiliation” signifient ou bien qu’ils sont avilis et humiliés, ou bien que les prescriptions islamiques les régissent.

Tout détenteur de l’autorité doit imposer la capitation aux adeptes des religions révélées qui passent sous notre protection, pour qu’ils puissent ainsi séjourner en territoire d’islam, et le versement qu’ils en font leur vaut deux droits : d’être laissés tranquilles et d’être protégés, de sorte que, grâce au premier, ils ont la sécurité et, grâce au second, ils trouvent l’abri de notre bras. Nâfi’ rapporte d’après Ibn ‘Omar que les derniers mots prononcés par le Prophète furent : “Maintenez-moi dans ma sauvegarde [28]”.

Les Arabes sont, tout comme les autres, soumis [s’il y a lieu] à la capitation ; Aboû Hanîfa cependant a dit : “Je ne l’impose pas aux Arabes pour que l’humiliation ne les atteigne pas”. Le renégat n’y est pas soumis, non plus que le matérialiste ou l’idolâtre ; Aboû Hanîfa néanmoins y assujettit ce dernier quand il est non-arabe, mais non quand il est arabe.

Les adeptes de livres révélés sont les juifs et les chrétiens, qui ont respectivement pour livres sacrés la Tôra et l’Évangile. Au point de vue de la capitation, les Madjoûs sont traités comme les deux peuples précédents [29], bien qu’il soit interdit de manger des animaux égorgés par eux et d’épouser les femmes de leur race.

La capitation frappe aussi les Çabéens et les Samaritains quand leur croyance est fondamentalement identique à celle des juifs et des chrétiens, encore qu’en différant dans les pratiques ; au contraire, elle ne les frappe pas si leur croyance diffère fondamentalement de celle des juifs et des chrétiens.

Celui qui embrasse le judaïsme ou le christianisme tels qu’ils étaient avant les modifications introduites dans ces deux religions, reste libre d’en suivre les croyances [30], au contraire du cas où il les embrasse sous une forme postérieure à ces modifications.

Celui dont la situation exacte est inconnue est soumis à la capitation, mais la chair des bêtes égorgées par lui n’est pas licite. Celui qui passe d’une secte juive à une secte chrétienne n’est pas laissé libre de le faire ; d’après la plus fondée des deux opinions, il est tenu de se faire musulman. S’il réembrasse la religion qu’il avait abandonnée, reste-t-il tel qu’il était ? Il y a à ce sujet deux opinions.

De l’avis unanime des juristes, il n’y a pas, au point de vue de la capitation à distinguer entre les juifs de Khayber et les autres.

Cet impôt ne frappe que les mâles libres et sains d’esprit et épargne la femme, l’enfant, le dément et l’esclave, car ce sont là des appendices et des produits [31]. S’il se trouvait parmi eux une femme isolée, même en acceptant ce point de vue que la femme n’est qu’une annexe soit de son époux soit de quelque parent, elle échapperait à la capitation, car elle n’est qu’une dépendance des mâles de son peuple, encore qu’ils ne lui soient point apparentés. Une femme isolée et sans famille qui, se trouvant en “territoire de guerre”, acquitterait la capitation pour séjourner en “territoire d’islam”, n’est pas tenue à ce versement, qui n’est qu’une espèce de cadeau auquel elle peut se refuser, et elle a droit à être protégée, bien que cependant elle ne constitue pas, dans ce cas, une dépendance directe de ses coreligionnaires.

L’hermaphrodite douteux y échappe également ; si le doute disparaît et que son sexe masculin soit établi, il y est tenu pour la période ultérieure, mais non pour la période antérieure.

Les juristes sont en désaccord sur le montant de la capitation. Aboû Hanîfa divise les assujettis en trois catégories : les riches, qu’il taxe à 48 dirhems, ceux d’aisance moyenne, à 24 dirhems, et les pauvres, à 12 dirhems ; il en fixe donc le minimum et le maximum et empêche la taxation arbitraire des autorités. D’après Mâlek, il n’y a pas de limites fixées au maximum ni au minimum, qui sont l’un et l’autre remis à l’appréciation des autorités. D’après Châfe’i enfin, le minimum au-dessous duquel on ne peut descendre est d’un dinar, et le maximum, qui n’est pas fixé, dépend de l’appréciation des autorités consultées par l’imâm ; celui-ci s’efforce d’uniformiser la taxe ou de la graduer d’après les fortunes. Quand ses efforts ont abouti, d’un commun accord avec les chefs des assujettis, à fixer le contrat de capitation, le montant s’en impose à tous ces fidèles et à leurs descendants, de génération en génération, et il n’est plus permis dorénavant à un chef d’en réduire ou d’en augmenter le montant.

Quand la paix est octroyée moyennant le paiement d’une double dîme, ce contrat est observé. C’est ainsi que fit ‘Omar ben el-Khattâb avec les Tonoûkh, les Behrâ [32] et les Benoû Taghleb en Syrie. Cette double dîme n’est alors due ni par les femmes ni par les enfants, car c’est une véritable capitation employée au profit des ayants droit du fey, et elle est différente de la dîme proprement dite, zekât, à laquelle sont tenus les femmes et les enfants. Si l’un et l’autre impôts se cumulent, ils sont perçus en même temps ; s’il n’y en a qu’un, il s’agit, lorsque le montant annuel n’en est pas inférieur à un dinar, d’une capitation.

Quand la paix leur a été consentie moyennant le devoir d’hospitalité vis-à-vis des musulmans de passage chez eux, ce devoir est limité à une durée de trois jours, qui ne peut être augmentée. Ce fut de la sorte qu’‘Omar traita avec les chrétiens de Syrie en leur imposant la charge d’héberger pendant trois jours les musulmans qui passeraient par chez eux en leur fournissant la nourriture en usage, mais sans obligation de sacrifier un mouton ou une poule, ainsi que la charge de donner à leurs bêtes un abri nocturne [33] mais sans fournir l’orge à celles-ci ; il ne soumit d’ailleurs à cette charge que les habitants de la campagne, à l’exclusion de ceux des villes. Si l’imâm n’impose pas aux vaincus ce devoir d’hospitalité et la double dîme, ils ne doivent pas payer la dîme sur les récoltes et les fruits, non plus qu’ils n’ont à héberger ni mendiant ni voyageur. Dans le contrat de capitation interviennent deux clauses, dont l’une est de rigueur et l’autre recommandable. La première comprend six articles : a) ils ne doivent ni attaquer ni dénaturer le Livre sacré ; b) non plus qu’accuser le Prophète de mensonge ou le citer avec mépris ; c) ni parler de la religion islamique pour la blâmer ou la contester ; d) ni entreprendre une musulmane en vue de relations illicites ou de mariage ; e) ni détourner de la foi aucun musulman ni lui nuire dans sa personne ou ses biens ; f) ni venir en aide aux ennemis ou accueillir aucun de leurs espions. Ce sont là des devoirs qui sont pour eux d’obligation stricte et auxquels ils ont à se conformer sans qu’il y ait besoin de les stipuler ; si on le fait, c’est uniquement pour les leur faire connaître, pour corroborer la solennité de l’engagement qui leur est imposé et pour bien marquer que dorénavant l’exécution d’un de ces actes entraînera la rupture du traité qui leur a été consenti.

La seconde clause, qui n’est que recommandable, porte aussi sur six points : a) le changement de leur tenue extérieure par le port du signe distinctif, ghiyâr, et de la ceinture spéciale, zonnâr ; b) la défense d’élever des constructions plus hautes que celles des musulmans ; ils n’en auront que de hauteur égale, sinon inférieure ; c) la défense de froisser les oreilles musulmanes par le son de leurs cloches, nâkoûs, la lecture de leurs livres et leurs prétentions relatives à ‘Ozeyr [34] et au Messie ; d) celle de ne point se livrer publiquement à la consommation du vin non plus qu’à l’exhibition des croix et des porcs ; e) l’obligation de procéder en secret à l’inhumation de leurs morts, sans étalage de pleurs ni de lamentations ; f) l’interdiction d’employer pour montures des chevaux, qu’ils soient de race ou de sang mêlé, ce qui leur laisse la faculté de se servir de mulets et d’ânes. Ces six prescriptions recommandables ne sont point nécessairement incluses dans le contrat de vasselage, à moins qu’elles n’aient été expressément stipulées, car alors elles prennent un caractère strictement obligatoire. Le fait d’y contrevenir alors qu’elles ont été stipulées n’entraîne pas la rupture du contrat, mais les infidèles sont contraints par la force à les respecter et châtiés pour les avoir violées. Ils n’encourent pas de châtiment quand rien n’a été stipulé à ce sujet.

L’imâm fixe les termes dans lesquels est intervenu le contrat de paix par la mention faite dans les [registres des] dîwân des grandes villes, de manière que les tributaires soient tenus par ce texte quand ils s’en écartent ; chaque groupe, en effet, a un contrat spécial qui est souvent différent d’un autre.

La capitation n’est due qu’une fois par année et quand les douze mois lunaires sont achevés. Si un assujetti vient à mourir, au cours de l’année, la part correspondant à la partie écoulée de cette période est payée par sa succession ; de même s’il vient à se convertir, la part de la capitation due pour la portion écoulée de l’année est une dette dont il reste tenu. Aboû Hanîfa cependant décharge le mort ou le converti de ce prorata de la capitation. L’enfant qui atteint la puberté et le dément qui recouvre la raison ne doivent pas la capitation pendant une année, et n’y sont soumis que l’année suivante. Le pauvre qui arrive à l’aisance y est soumis, et un délai lui est accordé s’il est dans la gêne. Ni la vieillesse ni la paralysie ne sont des causes d’exemption ; cependant une opinion prétend le contraire pour ces deux cas, de même que pour celui d’indigence.

Quand il s’élève des différends entre tributaires au sujet de leur religion et qu’ils sont en désaccord sur leurs croyances, il n’y a pas à intervenir pour y mettre fin. Quand ils sont en procès au sujet d’un droit, et s’adressent à leur chef pour lui demander de décider, il n’y est pas mis obstacle ; s’ils recourent à nos représentants de l’autorité, ceux-ci décident conformément à la loi musulmane. Nos lois pénales écrites leur sont appliquées quand ils s’y exposent. Celui qui viole le traité qui lui a été consenti peut regagner son lieu de sécurité, et alors il redevient ennemi [35].

Ceux avec qui il y a traité peuvent pénétrer en territoire d’islam avec sécurité pour leur vie et leurs biens ; leur séjour peut s’y prolonger pendant quatre mois sans qu’ils aient à payer la capitation ; mais celle-ci est due si leur séjour se prolonge pendant un an. Pour un espace de temps compris entre ces deux limites, on n’est pas d’accord. On doit s’abstenir de leur faire tort, tout comme à l’égard des tributaires ; mais on n’a pas à les protéger, à la différence de ce qui est pour ces derniers.

Quand un musulman pubère et doué de raison consent l’amân à un ennemi, tous les musulmans sont tenus de respecter cette convention ; la femme peut accorder l’amân tout comme l’homme, et l’esclave aussi bien que l’ingénu. Cependant, d’après Aboû Hanîfa, l’amân consenti par l’esclave n’est valable que si celui-ci a reçu l’autorisation de combattre. L’amân consenti par l’enfant ou le dément est sans valeur et celui qui en bénéficie reste dans la condition d’ennemi, sauf s’il en ignore la nullité, auquel cas il regagne son lieu de sécurité, et reprend alors sa condition d’ennemi.

Quand des alliés et des tributaires s’unissent pour combattre les musulmans, ils deviennent aussitôt ennemis et chacun de ces combattants peut être mis à mort ; pour ceux qui n’ont pas pris les armes, il est tenu compte de l’approbation qu’ils ont donnée aux hostilités ou de leur improbation.

Le refus des tributaires de s’acquitter de la capitation constitue une violation du traité qui leur a été consenti. D’après Aboû Hanîfa, ce refus ne constitue une violation que si en outre ils rejoignent le “territoire de guerre”. Le montant de l’impôt est prélevé par la force, au même titre que les autres dettes.

Ils ne peuvent élever en pays d’islam de nouvelles synagogues ou églises, qui sont, le cas échéant, démolies à leur détriment ; ils peuvent réédifier les anciennes synagogues ou églises tombées en ruine.

La violation de leur contrat par les tributaires n’autorise leur mise à mort, le pillage de leurs biens et la réduction en captivité de leurs femmes et enfants que quand ils nous combattent ; autrement, on les expulse du territoire musulman, en les respectant, jusqu’à ce qu’ils atteignent leur lieu de sécurité, dans le plus proche pays polythéiste. S’ils ne partent pas de bon gré, ils sont expulsés de force [36].

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La République Moderne

(325 ans)

La République Moderne

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Anciens – Modernes

(Deux visions religieuses différentes : dans l’Antiquité et dans les Temps Modernes.)

Hellènes

Le MAÎTRE du Cosmos, “des dieux et des hommes”.

1- La vertu du CITOYEN dans la PATRIE, est faite de Maîtrise stoïcienne du Moi-politique, en vue du triomphe du Droit.

2- Elle trouve son reflet dans la Beauté SCULPTURALE du COSMOS.

Déistes

L’AUTEUR de l’Univers, “des agréés du monde intelligible et des hommes du monde sensible”.

1- La vertu du PROPRIÉTAIRE dans la NATION, est faite de l’Exigence calviniste du Moi-civil, en vue du triomphe de la Morale.

2- Elle trouve son reflet dans l’Harmonie INGÉNIEUSE de l’UNIVERS.

F. Malot

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Antisémites !

Saint Augustin (400), Grégoire le Grand (600), Saint Bernard (1150), Etc. :

Il ne faut ni voler ni tuer les Juifs, mais les protéger dans leur état d’humiliation et de dispersion, pour garder vivant le témoignage du DÉÏCIDE, de la Passion de Jésus-Christ.

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Luther :

1543 : “Contre les Juifs et leurs mensonges”.

Les Juifs sont coupables de meurtre rituel, d’empoisonnement des puits, de sorcellerie. Ce sont des usuriers. Leurs maisons et synagogues doivent être brûlées, le Talmud et leurs livres de prières confisqués. On doit les condamner aux travaux forcés.

(Selon J. Attali. L’ouvrage est absent des “œuvres complètes” de Genève !)

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Voltaire :

1756 : “Essai sur les Mœurs”.

“On regarde les Juifs du même œil que nous voyons les Nègres, comme une espèce d’hommes inférieurs”.

1764 : Lettre, reprise dans le Dictionnaire Philosophique.

“Les hébreux ont presque toujours été errants, ou brigands, ou esclaves, ou séditieux. Ils sont encore vagabonds aujourd’hui sur la terre, et en horreur aux hommes, assurant que le Ciel et la terre et tous les hommes ont été créés pour eux seuls. Vous ne trouverez en eux qu’un peuple ignorant et barbare, qui joint depuis longtemps la plus sordide avarice à la plus détestable superstition, et à la plus invariable haine pour tous les peuples qui les tolèrent et qui les enrichissent. Vous, les Juifs, êtes des animaux calculants ; tâchez d’être des animaux pensants !”

(Les Hébreux furent nommés HABIROU = les Errants, en Égypte ancienne).

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Ouriel Da Costa

(1585-1640)

Rationaliste et libre-penseur. Nommé originellement Gabriel Da Costa (ou Acosta), il naquit à Oporto (Portugal) ; sa famille descendait de marranes [juifs faussement convertis au catholicisme] portugais. Après avoir étudié la loi canonique et reçu un emploi subalterne dans l’Église catholique, Da Costa se détacha de la doctrine chrétienne ; en lisant la Bible hébraïque, il décida finalement qu’un retour formel au judaïsme lui était nécessaire. Autour de 1615, Da Costa se réfugia donc à Amsterdam avec sa mère et ses quatre frères, tous heureux de la possibilité de professer ouvertement leur foi juive. Après un an ou deux, cependant, Da Costa et le rabbinat séfarade d’Amsterdam entrèrent en conflit. Son concept “biblique” du judaïsme ne tenait aucun compte des développements halakhiques et son approche ne le faisait pas aimer des rabbins de la communauté hollandaise, qu’il traitait avec dérision de “pharisiens”. Eux, de leur côté, requéraient une discipline communautaire rigide et – craignant la réaction protestante hollandaise à l’égard de ce non-conformiste – le considéraient comme un fauteur de troubles. La critique de Da Costa sur la doctrine et la pratique rabbiniques, Examen dos Tradiçoens Phariseas Conferidas con a ley Escrita, attaquant le “ritualisme” tout en mettant en question l’immortalité de l’âme, outrageait les dirigeants séfarades et, après sa publication en 1624, elle fut brûlée. L’excommunication imposée à l’auteur resta en vigueur jusqu’en 1633, date à laquelle, incapable de supporter plus longtemps son isolement, il se soumit au rabbinat.

Acceptable socialement, quoique intérieurement impénitent, Da Costa passa alors du rejet de la loi orale à une vision déiste de la Bible qui devançait l’approche philosophique de Spinoza. Comme il le rapporta dans l’émouvante autobiographie en latin qui fut publiée bien des années après sa mort : “Je commençai à me demander si la loi de Moïse devait être considérée comme la loi de Dieu, et je conclus que ce n’était rien de plus qu’une invention humaine” (Exemplar Humanae Vitae, 1687). De telles opinions hérétiques, ajoutées à l’abandon par Da Costa de l’observance religieuse, renouvelèrent son conflit avec le rabbinat et amenèrent à une nouvelle excommunication (1633-1640). Au bout de sept années supplémentaires d’ostracisme, imposées aussi à sa famille, Da Costa se rétracta à nouveau ; mais l’humiliation publique à laquelle il fut soumis, notamment les trente-neuf coups de fouet qu’il subit dans la synagogue d’Amsterdam, minèrent son esprit et l’incitèrent à se suicider. Pour beaucoup d’intellectuels depuis lors, Ouriel Da Costa a été idéalisé comme un “héros de la conscience” et un pionnier dans la lutte contre l’intolérance religieuse.

Encyclopédie du Judaïsme

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Joseph David Sintzheim

(1745-1812)

Joseph David Sintzheim

Président du Grand Sanhédrin

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Décisions doctrinales du Grand Sanhédrin

Qui s’est tenu à Paris au mois d’Adar premier, l’an de la Création 5567 (février 1807 ), sous les auspices de Napoléon-Le-Grand.

Liste des Membres, Rabbins et Laïques, dont a été composée l’Assemblée du Grand Sanhédrin :

Membres Rabbins :

Président : SINTZHEIM (David), de Strasbourg, Bas-Rhin.

Premier Assesseur : SEGRE ( Sauveur Benoît ), de Verceil, Sésia.

Deuxième Assesseur : COLOGNA (Abraham), de Mantoue, Mincio.

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Préambule des décrets

BÉNI soit à jamais le Seigneur Dieu d’Israël qui a placé sur le Trône de France et du Royaume d’Italie un Prince selon son cœur.

Dieu a vu l’abaissement des descendants de l’antique Jacob et il a choisi NAPOLÉON-LE-GRAND pour être l’instrument de sa miséricorde.

Le Seigneur juge les pensées, lui seul commande aux consciences, et son Oint chéri a permis que chacun adorât le Seigneur selon sa croyance et sa foi.

À l’ombre de son nom, la sécurité est entrée dans nos cœurs et dans nos demeures ; et nous pouvons désormais bâtir, ensemencer, moissonner, cultiver les sciences humaines, appartenir à la grande famille de l’État, le servir, et nous glorifier de ses nobles destinées.

Sa haute sagesse a permis que cette Assemblée célèbre dans nos annales, et dont l’expérience et la vertu dictaient les décisions, reparût après quinze siècles et concourût à ses bienfaits sur Israël.

Réunis aujourd’hui sous sa puissante protection dans sa bonne ville de Paris, au nombre de soixante-onze, docteurs de la Loi et notables d’Israël, nous nous constituons en GRAND SANHÉDRIN, afin de trouver en nous le moyen et la force de rendre des Ordonnances religieuses conformes aux principes de nos saintes Lois, et qui servent de règle et d’exemple à tous les Israélites.

Ces Ordonnances apprendront aux Nations que nos dogmes se concilient avec les lois civiles sous lesquelles nous vivons, et ne nous séparent point de la société des hommes.

En conséquence déclarons : Que la loi divine, ce précieux héritage de nos ancêtres, contient des dispositions religieuses et des dispositions politiques ;

Que les dispositions religieuses sont, par leur nature, absolues et indépendantes des circonstances et des temps ;

Qu’il n’en est pas de même des dispositions politiques ; c’est-à-dire de celles qui constituent le gouvernement, et qui étaient destinées à régir le peuple d’Israël dans la Palestine lorsqu’il avait ses Rois, ses Pontifes et ses Magistrats ;

Que ces dispositions politiques ne sauraient être applicables depuis qu’il ne forme plus un corps de nation ;

Qu’en consacrant cette distinction déjà établie par la tradition, le Grand Sanhédrin déclare un fait incontestable ;

Qu’une assemblée des docteurs de la Loi, réunie en Grand Sanhédrin, pouvait seule déterminer les conséquences qui en dérivent ;

Que si les anciens Sanhédrins ne l’ont pas fait, c’est que les circonstances politiques ne l’exigeaient point, et que, depuis l’entière dispersion d’Israël, aucun Sanhédrin n’avait été réuni avant celui-ci ;

Engagés dans ce pieux dessein, nous invoquons la lumière divine, de laquelle émanent tous les biens, et nous nous reconnaissons obligés de concourir, autant qu’il dépendra de nous, à l’achèvement de la régénération morale d’Israël.

Ainsi en vertu du droit que nous confèrent nos usages et nos lois sacrées, et qui détermine que dans l’assemblée des docteurs du siècle réside essentiellement la faculté de statuer, selon l’urgence des cas, ce qui requiert l’observance desdites lois, soit écrites, soit traditionnelles, nous procéderons dans l’objet de prescrire religieusement l’obéissance aux lois de l’État en matière civile et politique.

Pénétrés de cette sainte maxime, que la crainte de Dieu est le principe de toute sagesse, nous élevons nos regards vers le Ciel, nous étendons nos mains vers son sanctuaire, et nous l’implorons pour qu’il daigne nous éclairer de sa lumière, nous diriger dans le sentier de la vertu et de la vérité, afin que nous puissions conduire nos frères pour leur félicité et celle de leurs descendants.

Partant, nous enjoignons, au nom du Seigneur notre Dieu, à tous nos coreligionnaires des deux sexes d’observer fidèlement nos déclarations, statuts et ordonnances, regardant d’avance ceux de France et d’Italie qui les violeront ou en négligeront l’observation, comme péchant notoirement contre la volonté du Seigneur, Dieu d’Israël.

Et sit splendor Domini Dei nostri super nos et opera manuum nostrarum dirige super nos : et opus manuum nostrarum dirige (Psalm. 90, (Vulg. 89.) v. 17.).

•••

Ordonne également, le Grand Sanhédrin, à tous les Rabbins, dans leurs prédications et leurs instructions, de ne rien négliger auprès de leurs coreligionnaires pour accréditer dans leur esprit les maximes contenues dans la présente décision.

Conforme au Texte original.
Les Membres du Consistoire Central, Séant à Paris :

DAVID SINTZHEIM, Président ; Le Chevalier de COLOGNA, Grand-Rabbin ; EMMANUEL DEUTZ, Grand-Rabbin ; JACOU LAZARD ; AARON SCHMOLL ; M. SASPORTAS, Secrétaire.

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Napoléon et le Grand Sanhédrin

Enfin survint la Grande Révolution apportant le “décret d’émancipation” (1791). Alors, tous les espoirs devenaient permis. De fait, Portalis réaffirmait : “La religion juive doit participer comme les autres à la liberté” (1802).

On n’en resta pas là. Napoléon, “qui ne plaisantait pas” (Talleyrand) en vint à prendre le taureau par les cornes :

• 1806 : “Il faut assembler les États Généraux des Juifs” ;

• 1807 : Constitution du “Grand Sanhédrin”, composé des rabbins les plus éminents de France, Italie et Hollande. C’était la restauration du conseil suprême des anciens Hébreux, dispersé depuis Titus (1800 ans !).

Le miracle se produisit. L’“Assemblée des gens assis”, les “71” présidés par le “Nassi”, se réunit. Le chef des “Docteurs et Notables d’Israël” (David Sintzheim) ne peut retenir son enthousiasme : “L’Arche est dans le port… O Israël, sèche tes larmes, ton Dieu vient renouveler son alliance… Grâces soient rendues au Héros (l’Empereur) à jamais célèbre…, image sensible de la Divinité… Ministre de la justice éternelle, tous les hommes sont égaux devant lui” (J. Lémann – 1894).

Voilà comment Bonaparte devint le Messie tant attendu, avec dispense spéciale d’appartenir à la “maison” de David. L’Aigle, le “Washington couronné” (Mémorial), méritait bien cela…

Extrait du Sud (La Fin de la Préhistoire), F. Malot, Éditions de l’Évidence

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Octobre 1917 : Lénine arrive !

Pour beaucoup, le pouvoir soviétique apparaissait comme un sauveur. On vit des Juifs religieux “prier avec ferveur, implorer de l’Éternel la protection des soldats bolcheviks”.

Henri Minczeles : Histoire du Bund [37] – 1995 ;
publiée sous la direction d’Olivier Rubinstein.

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[1] Symbole : Formulaire des “Articles de Foi”.

[2] Ces autres ouvrages sont les traités exégétiques d’Hippolyte et sa Chronique. Les développements suivants sur les généalogies des patriarches et les origines du peuple hébreu sont tirés de la Chronique (v. Bauer, Chronique, dans Texte und Untersuchungen, XIX, 1, p. 158 et suiv.). C’est également à sa Chronique qu’Hippolyte fait allusion dans un autre passage de ce même paragraphe, où il parle des soixante-douze peuples, dont, dit-il, “nous avons donné les noms dans d’autres livres.” Voir cette liste des soixante-douze peuples dans la Chronique, parag. 200, éd. Bauer.

[3] Cette déclaration est dirigée contre les systèmes philosophiques grecs qui professaient, l’éternité de la matière et contre le dualisme gnostique.

[4] C’est-à-dire : quand il se décida à créer, Dieu, en vertu de sa prescience avait une connaissance exacte et parfaite de tous les êtres qu’il allait faire.

[5] Ce passage est très important : il suffirait à lui seul à prouver péremptoirement que les Philosophumena sont bien l’œuvre d’Hippolyte. Car l’auteur des Philosophumena nous déclare ici qu’il est également l’auteur du traité Sur l’essence de l’univers. Or ce dernier livre est sûrement d’Hippolyte : il figure, parmi les principaux ouvrages d’Hippolyte, sur le catalogue épigraphique de la chaire et l’on sait que ce catalogue fait autorité. Sur la chaire, il est intitulé : Contre les Grecs et contre Platon ou sur l’univers.

[6] Hippolyte développe ici sa théorie du Logos. Il l’avait déjà présentée dans son traité Contre Noël, 10-11. Ces deux exposés se complétant l’un l’autre, nous allons reproduire celui du traité Contre Noël.

“Dieu étant simple, sans aucun être qui lui fût contemporain, voulut créer le monde. Il le conçut, le voulut, et, par sa parole, il le produisit ; le monde aussitôt existe devant lui selon sa volonté ; rien n’est coéternel à Dieu. Il n’y avait rien en dehors de lui ; mais, tout en étant seul, il était multiple, car il n’était pas sans Parole, sans Sagesse, sans Puissance, sans Conseil. Tout était en lui et lui était tout. Quand il le voulut et comme il le voulut, au temps déterminé par lui, il fit paraître sa Parole, par laquelle il a tout fait. Dès qu’il veut, il fait ; dès qu’il projette, il accomplit ; dès qu’il parle, il montre l’effet de sa parole ; dès qu’il se met à façonner, il fait éclater sa sagesse. Car tout ce qui a été fait résulte de sa Parole et de sa Sagesse : par sa Parole il crée, par sa Sagesse il ordonne. Il créa donc comme il le voulut, car il était Dieu. Mais comme chef, conseiller et instrument de création, il engendrait le Verbe. Ce Verbe qu’il avait en lui à l’état invisible, il le rend visible en prononçant le premier mot. C’est une lumière qui naît d’une lumière ; il le tire de lui pour en faire le maître de la création. C’est son intelligence à lui. Jusque-là il n’était visible qu’à Dieu seul, invisible au monde ; il le fait voir alors au monde afin qu’en le voyant le monde puisse être sauvé. De cette façon il y eut un autre par rapport à Dieu. Mais en disant autre, je ne dis pas deux Dieux ; j’entends comme une lumière produite par une lumière, comme une eau qui sort d’une source, un rayon qui s’échappe du soleil. La puissance est une ; elle vient de l’être qui est tout ; le Père est tout, c’est de lui que vient la puissance Verbe. Le Verbe est l’intelligence qui, apparaissant dans le monde, s’est montrée comme Fils de Dieu. Tout vient de lui : lui seul procède du Père.” (traduction de l’abbé Amann). – Voir l’exposé de la théologie du Logos d’après Hippolyte dans notre Introduction, p. 50-52.

[7] C’est-à-dire : le Verbe est le seul qui n’ait pas été tiré du néant, mais qui soit sorti de l’être : il a été en effet engendré par Dieu lui-même, qui est l’être par excellence.

[8] D’après la leçon du manuscrit, il faudrait traduire : ou mâles, ou n’ayant pas besoin de femelles.

[9] C’est-à-dire : l’homme n’est pas un dieu manqué, il est bien tel que Dieu a voulu qu’il soit, ni Dieu, ni ange, mais simplement homme.

[10] Sur cette divinité très relative du Logos, v. notre Introduction, p. 54-55.

[11] Cf. Matthieu, XXV, 21, 23 ; – Luc, XIX, 17.

[12] On pourrait encore traduire : l’homme a en lui-même tous les contraires.

[13] Cf. Ps, CX (109), 3 ; II Pierre, I, 18-19.

[14] Ou bien : par ses paroles.

[15] La prédication du prophète ne permettait que d’entrevoir obscurément le Logos, caché, pour ainsi dire, derrière le prophète qu’il inspirait. Dieu ne voulait plus pour le Logos de ce demi-jour ; il résolut donc de le manifester en pleine lumière aux yeux des hommes.

[16] C’est-à-dire : le modèle que le Logos incarné propose à l’imitation des hommes, ce n’est pas sa divinité, c’est son humanité, l’homme authentique qui est en lui. Le but proposé n’est donc pas au-dessus de la portée des hommes.

[17] Comme on est loin du “Dolorisme” païen des Thérèse d’Avila et Jean de la Croix ! Ici, la passion du Christ nous sert à penser, vivre et combattre joyeusement… (note de F. Malot).

[18] Pour le dernier membre de cette phrase (le ver qui fouille, etc.), le texte du manuscrit est irrémédiablement corrompu ; chaque éditeur l’a reconstitué à sa manière.

[19] Pour Hippolyte, la rédemption opérée par le Christ est, pourrait-on dire, d’ordre intellectuel. C’est l’une des particularités les plus curieuses de sa théologie. Sans doute il ne néglige pas totalement la mort du Christ ; dans son traité Sur l’Antéchrist, 26, il nous dit que “c’est par sa mort que le Christ a vaincu la mort.” Dans le Commentaire sur Daniel, II, 36, nous lisons ces mots : “Afin que nous vivions par la mort qu’il a soufferte sur la croix.” Mais, en général, Hippolyte insiste principalement sur les lumières que le Logos incarné a apportées aux hommes : c’est par la connaissance du véritable Dieu, de son Logos et des vérités que celui-ci a révélées que le monde peut-être sauvé.

[20] Sur cette expression, bizarre au premier abord : être connu de Dieu, cf. I Cor, VIII, 3 ; XIII, 12 ; Galates, IV, 9. Cette connaissance que Dieu a d’un homme ne doit pas s’entendre d’une connaissance purement spéculative, mais d’une connaissance de prédilection, d’une pensée de bienveillance toute spéciale. C’est cette connaissance ou pensée bienveillante qui est à la base du salut : “Ceux qu’il (Dieu) a prévus, il les a prédestinés…, ceux qu’il a prédestinés, il les a appelés, ceux qu’il a appelés, il les a justifiés, et ceux qu’il a justifiés, il les a glorifiés”. (Romains, VIII, 29-30).

[21] Ce chapitre est intitulé l’Immunité (elberat) parce qu’il parle de l’immunité accordée par Mahomet aux infidèles pendant un certain temps, ou bien parce que, ce terme expiré, les fidèles seront dans une liberté complète (berat) d’agir avec les idolâtres comme ils voudront. Il est intitulé le Repentir, car il est question du repentir dans ce chapitre. C’est la seule sourate en tête de laquelle ne se trouve pas l’invocation usuelle bismillahi rahmanirrahim (au nom du Dieu clément et miséricordieux). On croit que cette omission vient de ce que ce chapitre a dû dans l’origine n’en former qu’un seul avec le précèdent, ou bien de ce que Mahomet n’a rien décidé là-dessus, le chapitre ayant été révélé peu de temps avant sa mort. C’est encore la seule sourate qui ait été révélée, dit-on, à la fois, quelques versets exceptés.

[22] Ozaïr est le même qu’Esdras. C’est cet homme, disent les commentateurs, que Dieu avait fait mourir, et qu’il ressuscita au bout de cent ans. Ozaïr ressuscité récita aux juifs tout le Pentateuque qu’il savait par cœur avant de mourir, ce qui fit dire aux juifs que, pour le faire, il fallait qu’il fût fils de Dieu.

[23] Ou que Dieu les combatte, formule de malédiction.

[24] Ceci est sans doute une allusion au titre rabbi, seigneur, que les juifs donnaient à leurs docteurs, et les chrétiens à leurs prêtres. Chez les Arabes, depuis Mahomet, ce mot ne saurait s’appliquer qu’à Dieu seul.

[25] On entend par là les présents que l’on donnait aux prêtres pour obtenir des dispenses, des indulgences, etc. Mahomet appelle cela elbatel, ce qui est vain.

[26] Le premier muezzin, BILAL-HABECBI, esclave affranchi par Mahomet, criait l’Ezann dans l’antichambre de Mahomet qui dormait. Aïcha le lui reprocha derrière la porte ; Bilal répliqua par cette phrase. Le prophète, à son réveil, applaudit son ami, et inséra la formule dans les Ezann du matin.

[27] De ces quatre derniers mots les commentateurs, aussi peu renseignés que nous, proposent des explications très variées ; voir notamment Beydâwi, I, 383, et Ismâ’il Hakki, éd. Csp., I, 888 ; Dozy, Supplément, II, 849,b ; infrà.

[28] Cette traduction, calquée sur un texte que je n’ai pas rencontré ailleurs et dont je ne connais pas d’explication, est-elle exacte ? Peut-être faut-il le rapprocher de ce qu’on lit dans la lettre de garantie attribuée au Prophète lui-même (?) et qui, extraite du recueil de Feridoûn, a été publiée en texte et traduction dans “L’union islamique” d’Eug. Clavel, fasc. 1er (Le Caire, 1897). D’ailleurs les dernières paroles du Prophète sont relatées autrement dans la Sîrat, reproduite par C. de Perceval, III, 323.

[29] D’après Beydâwi (I, 383), ‘Omar ne prélevait pas tout d’abord la capitation sur les Madjoûs ; il ne les y soumit que quand ‘Abd er-Rahman ben ‘Awf lui eut attesté que le Prophète l’avait fait payer aux Madjoûs de Hadjar parce qu’ils avaient une espèce de livre révélé et qu’ils devaient être traités comme les kitabiy. Voir également Belâdhori, p. 80 ; Aboû Yoûsof, Kharâdj, p. 38, I. 7.

[30] L’interprétation de tout ce passage, où il est question d’hypothèses non-prévues ailleurs, à ma connaissance, est assez délicate ; il ne semble pourtant pas qu’on puisse raisonnablement s’en écarter. Le Tanbih (p. 275, I. 18) relate une opinion qui fixe au même taux la diya du musulman et celle de l’adepte d’un livre révélé non-modifié. – Sur les modifications apportées par les Juifs aux livres saints et que leur reprochent les Musulmans, cf. Makrîzi, Khitat, II, 475, ou Chrestomathie de Sacy, t. I, notamment p. 296.

[31] C’est-à-dire n’ayant pas d’existence indépendante, ne pouvant être regardés comme des chefs de famille.

[32] les noms de ces trois tribus chrétiennes figurent dans Ibn Khallikân (I, 97), qu’a reproduit Wüstenfeld (Geneal. Tabel., p. 104). Sur l’arrangement conclu entre ces tribus et ‘Omar, cf. la glose persane (notes Enger, p. 22).

[33] On sait que, à raison des coutumes orientales, il n’y a guère lieu de penser à un abri clos et couvert. Sur ces charges supplémentaires on peut voir encore les commentateurs de Sidi Khalîl ; Kremer, Culturgeschichte, I, 61 ; Belâdhori, 124 et 125.

[34] Ozaïr ou Esdras était (d’après le Koran, IX, 30) regardé par les Juifs ou par certains d’entre eux comme étant le fils de Dieu.

[35] Il s’agit ici des alliés proprement dits ; le cas de rupture du traité par les tributaires vient un peu plus loin. La version persane (notes Enger, p. 23) remarque que, d’après des traités châfé’ites estimés, celui qui viole le traité intervenu retombe au rang du captif à la suite de faits de guerre : l’imâm peut à son gré le mettre à mort ou le réduire en esclavage ou lui faire grâce ou consentir à une rançon. Cf. encore p. 291.

[36] La version persane (notes Enger, p. 23) ajoute ici : L’opinion châfé’ite la plus exacte est qu’il y a lieu de combattre les tributaires qui rompent par la force le traité conclu avec eux ; quand il est rompu autrement, l’imâm peut, à son gré, et ainsi qu’on l’a vu, les mettre à mort, les réduire en esclavage, leur faire grâce ou consentir à leur rachat.

[37] Bund : Union des Ouvriers juifs de Russie, Pologne et Lituanie, fondée en 1897.

(1897 : traduction en yiddish du Manifeste de Marx.)







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